Les Amants de juliette
doc 005
presse
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Un disque qui veut surprendre et qui surprend : pas de titre, pas de musiciens ? Ce sont les noms des musiciens (Serge Adam, Benoît Delbecq, Philippe Foch) qui font titre et qu’il faut aller chercher sur la tranche, ou sur le disque lui-même. Magnifique reproduction pour orner la pochette (Nicolas Simonin), mais pas un mot d’écrit. Et la musique ? Fraîche, nouvelle, inhabituelle, désaltérante parce qu’inclassable, elle évoque un long parcours à travers des contrées étranges, une traversée de paysages divers, tantôt arides, tantôt souriants, parfois luxuriants et parfois désertiques. Les dix pièces de l’album sont comme une musique de pèlerin, absorbés par une nécessité évidente d’atteindre un but qu’eux seuls connaissent. C’est un peu monotone, mais les longues marches sont toujours lancinantes : l’unité des climats sonores est certaine, comme celle de la distance entre les instruments. Une phrase de trompette ou parfois de flûte vole et zigzague, plane en cercles, bien haut en surplomb d’un sol exotique : quelques percussions (notamment des tablas) et un piano préparé qui abandonne toute idée de gamme ou d’accord pour s’inventer un tempérament qu’on devine tropical. Il ne faut plus parler d’un jeu percussion, mais d’un piano qui se fait lui-même percussion, talking drum qui imite son lointain parent la sanza, dont on dit qu’elle connaît l’avenir. Yvan Amar


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juin 1994

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juin 1994
« …ou le fantasme d’une musique « continue » : chaque morceau est une coupe dans le temps, ne renvoyant qu’à son inscription dans le cadre qu’elle délimite. C’est avec ce cadre et le « hors-champ » qu’il suppose que la musique va jouer, explorant le temps « spacialisé », comme à l’inverse une caméra balayant une toile réintroduit de la durée dans le figé de la représentation. Si bien qu’apparaît fragmenté, morcelé, un univers où les « blancs » sont aussi importants que la musique. Etagement de plans sonores, décalages d’ »à-plats », musique méditative. L’orchestration réunit des univers hétérogènes (indien, contemporain, jazz…) et évite les clichés de la « world music ». Au piano-cataracte, faisant s’entrechoquer des blocs de glace multicolores dans un flux granuleux qui découpe, hache le temps et impose la pulsation autant que la « couleur » rythmique, se superposent les tablas légers et précis, volutes sur quoi viennent se poser les notes ténues, les phrases étales de la trompette. Constamment maîtrisé, un projet intimiste et ambitieux.
Stéphane Ollivier
Le piano préparé est devenu rare. Or Benoît Delbecq en joue d’une façon très personnelle et intéressante, s’appuyant sur les tablas et les percussions de Philippe Foch. Serge Adam, trompettiste davidienne qui joue aussi des anches, sait mêler sa voix aux deux autres. Un disque rafraîchissant, servi dans une élégante et sobre boîte blanche d’où sort l’esprit de la musique qu’on entend.
Serge Baudot
 

juin 1994